L'empathie vous fera prendre la parole sans peur

L’empathie n’est pas répartie équitablement parmi les gens

Y a-t-il des narcissiques parmi mes lecteurs ? Si tu en deviens pervers, voilà un trouble de la personnalité antisociale, où antisocial équivaut à : manque d’empathie.
Mais des narcissiques, oui, il y en a. C’est simple, vous l’êtes tous, à différents degrés.

Y a-t-il des monstres privés d’empathie parmi mes lecteurs ?
Non, car si aucune pathologie ne t’a été diagnostiquée (à savoir, aucun trouble de la personnalité antisociale, par exemple), alors ton aptitude à ressentir de l’empathie n’est pas impossible, elle a juste été supprimée. Plutôt : tu l’as supprimée, malgré toi.
Puis, laissons les monstres pour les contes de fées : personne n’est une mythologie diabolique incarnée, contrairement à ce que peut dire Anthony Hopkins de son rôle du docteur Hannibal Lecter dans Le silence des agneaux. Lorsque nous qualifions quelqu’un de monstre, nous oublions que les monstres se créent.
Et ils se créent par la souffrance. Car le Mal n’existe pas, il n’est que souffrance aux externalités symptomatiques bannissables et, en effet, interchangeables. Nous pouvons tous devenir meilleurs.

L’empathie est la capacité à ressentir ce que ressent l’autre tel que cet autre ressent ce qu’il dit ressentir.
Ainsi, nous avons cet autre qui réagit émotionnellement à un objet (un événement ou une situation), interprété par ses soins.
L’empathie consiste donc, pour rephraser, à ressentir l’émotion même ressentie par l’autre, mais aussi, parvenir à cette émotion en adoptant les représentations de cet autre lorsque ces dernières seraient éloignées des nôtres.
Il se trouve que l’empathie est un symptôme aussi, celui d’un changement de perspective. Pour l’atteindre, ce qui est requis est une reconfiguration en profondeur. Une évolution qui est une compréhension, un travail sur soi et un lâcher prise en même temps. Trois avènements juxtaposés, mais indépendants.

Comment parvenir donc à ressentir l’empathie, la vraie ?

Qu’est-ce qui se passe lorsque nous ressentons de l’empathie ?

En quoi développer mon empathie rendra ma prise de parole plus pertinente et mes rapports aux autres plus sains ?

En quoi développer mon empathie est un absolu privilège en ce qui touche à mon accès au futur de ma vie ?

1. Nous entretenons un rapport ambigu avec l’empathie

Nous ne savons pas comment penser l’empathie

Nous pouvons facilement observer l’attrait que peut avoir le manque d’empathie. Il nous attire car il est « contre-nature », cependant il se dissémine aussi en nous à travers nous. Nous jugeons rapidement les autres, nous nous jugeons en premier. Le manque d’empathie n’équivaut-il pas à un manque d’amour propre ?
Les médias dépeignent la séduction dans le manque d’empathie. Le sensationnalisme médiatique opère, and when it bleeds, it leads, selon la maxime journalistique anglo-saxonne. Les tueurs en série nous accompagnent au lit, pour le repos mérité de l’être empathique.

Si j’étais habitant du village, enverrais-je au bûcher la créature de Frankenstein après l’avoir poursuivie avec mes camarades et nos fourches ? Suis-je blanc comme neige, ou gris ?
Ne pas éprouver d’empathie envers une créature empathique, est-ce de l’envie ou, dans ce cas, la peur primaire de l’inconnu ?

Adopterais-je la femme qui a tué ma fille, après que, couple meurtri, nous devenions empathiques à outrance ? (Oui, merci Netflix.)

Empathiques à outrance, ou juste empathiques ?

Le manque d’empathie détruit nos relations interpersonnelles

Si je suis dépourvu d’empathie, je ne parviens pas à ressentir ce que ressent la personne que j’ai en face telle qu’elle dit ressentir ce qu’elle ressent. La personne peut même apparaître comme totalement extérieure à nous, tellement extérieure à nous que l’extérieur n’est plus autre que nous, car nous remplissons l’extérieur avec ce que nous sommes, étant donné que nous ne pouvons y connecter. Le cauchemar, même, serait d’expérimenter la totale dissociation d’avec soi-même que subit le protagoniste en pâte à modeler d’Anomalisa, film d’animation écrit et réalisé par Charlie Kaufman, qui traite d’une pathologie qui transforme le visage des autres en notre propre visage, et nous nous voyons partout. Le narcissisme absolu.

Par manque d’empathie, les sentiments de l’autre sont enduits de nos propres sentiments et accommodés par eux. L’autre s’avère être une portion de nous-mêmes. Cet autre, régi par son libre arbitre, échappe à notre contrôle, nous faisant perdre la vitalité de la domination que nous exerçons sur ce qui nous entoure pour demeurer dans notre zone de confort (car le narcissisme est une protection qui, par le contrôle, espère éviter toute souffrance répétée). Ce déséquilibre nous pousse à rejeter l’autre qui, rejeté, finalement, nous quitte, et par la même occasion nous fait une énorme faveur.

2. Il est toujours possible de développer son empathie

Les étapes d’accès à l’empathie

Je ne peux pas choisir d’être, comme ça, de but en blanc, empathique. Je ne peux pas décider de me métamorphoser en quelqu’un d’autre, par l’œuvre magique du bon vouloir. Je ne suis pas libre car je me suis construit à mon insu, à l’enfance, lorsque je n’étais qu’un être subissant et impressionnable. Je suis devenu, à l’âge adulte, la répercussion des inefficacités et limitations affectives parentales. Le maillon ultérieur dans la chaîne des baffes de Barney Stinson dans How I met your mother ; il y explique qu’à son travail, c’est comme ça que les frustrations se propagent, et voyez, nous ne sommes pas loin de la réalité. En effet, il en va que cette « baffe », littéralement et figurativement, se met à piquer lorsque nous commençons à nous confronter au monde extérieur (par exemple, lorsque nous laissons derrière nous notre maisonnée pour entamer nos études).

A ce moment-là, un chemin long et éreintant s’ouvre devant nous, au gré duquel nous nous séparons progressivement de nos modalités et représentations erronées.
Au début, ces idées fausses que nous avons, nous les pensons à travers ces mêmes idées fausses. Il ne peut en être autrement. Mais petit à petit, au travers de questionnements exhaustifs, le différentiel d’entre nous (à savoir, le noyau tendre de notre sensibilité, prometteur d’amour propre et de réconfort) et la manière dont nous avons été bâtis, s’accentue.

La tension augmente, évidemment, car c’est un déchirement que de s’éloigner de tout ce que l’on connaît, de tous ces mécanismes qui sont autant d’addictions dans lesquelles nous nous complaisons que trop facilement.

Si nous possédons réellement la volonté de trouver la raison significative de notre personnalité, nous devons nous armer de courage. Désirer m’extraire à ma zone de confort n’est pas suffisant, et je ne peux qu’arriver à un certain point de mon évolution par l’intellect. Je dois, pour finaliser la rupture d’avec ce qui m’empêche de ressentir de l’empathie (et de donc m’ouvrir à la myriade de nouvelles sensations que cette transformation m’apporte), eh bien, faire confiance à l’autre et ne pas l’entrevoir comme un obstacle dans mon parcours. Encore faut-il que je reconnaisse le mérite de l’autre, mais cela j’y parviens sans peine en remarquant ses actions.

Encore faut-il que j’aime l’autre. Voilà la clé. Ce n’est que parce que j’aime l’autre, pour des motifs inexplicables, que le tiraillement intérieur auquel je me soumets pour rendre à l’autre ce qu’il m’apporte sera tel que je n’aurai d’autre option qu’à faire le bond en terre inconnue. Ce n’est que lorsque l’enjeu est extrême que nous devenons prêts à tout pour ne pas être relayés dans l’ombre de nos vies. Ce n’est que lorsque la turbulence émotive est à son paroxysme que nous sommes obligés de lâcher prise, car l’autre est trop important pour que nous puissions prendre le risque de le perdre.

Ce n’est que lorsque nous aimons que, par la figuration d’une image complète, qui explore et enveloppe l’entièreté de notre implication réelle dans la construction de notre personnage, que nous pouvons visualiser un nouvel arrangement de notre affect qui crédibilise la teneur de notre connexion à l’autre (et cela à nos propres yeux).

Notre profil affectif définit notre capacité empathique

Il est donc important de se concentrer sur son profil affectif, car il détermine nos modalités empathiques.
Avoir de l’empathie signifie ne plus penser à soi. Dans cette mesure, elle représente un risque contre lequel nous pouvons nous prémunir, même à la manière d’un réflexe contre lequel il serait difficile de lutter pour en venir à bout. Vulnérable empathique, si vous réussissez à surmonter quelques douches froides en exposant sincèrement vos émotions, vous empruntez d’ores et déjà la bonne voie. A l’aube de la vulnérabilité qui est une prise de risque, l’émotion donnée n’est pas utilisée contre nous, nous comprenons que nous pouvons faire confiance, cela nous inspire à considérer de s’oublier, un peu, pour ressentir pleinement ce qui nous est transmis par l’autre.

« Merci, à toi, cet autre qui, par l’amour que tu me portes, me pousses à ressentir ce que je ne me suis jamais permis de ressentir. »

Vous êtes-vous déjà dit un truc pareil ?

3. L’empathie sert la prise de parole convaincante

Le « monologue intérieur » est un outil empathique

Le monologue intérieur est une technique théâtrale qui consiste à entretenir une conversation avec soi-même cependant que l’on prend la parole en public.

Ce qu’il est primordial de comprendre est que les personnes dans votre auditoire ont envie et besoin d’avoir affaire à vous. Ils n’ont pas besoin ni envie, au contraire, de vous voir interpréter un personnage. Vous savez, ce personnage flamboyant et sûr de lui qui vous permet de ne pas avoir à vous exprimer sincèrement. Ce personnage qui vous expulse de la scène car vous vous êtes mal préparé et que le trac vous interdit vos facultés de communication.

Si vous faites cela, c’est-à-dire si vous permettez à quelqu’un d’autre de prendre votre place, les personnes dans l’auditoire vont se sentir trahies et dépossédées de leur libre arbitre car elles sont appelées à se prononcer sur leur adhésion à un discours, or elles ne savent pas qui prononce ce discours et une manipulation est donc possible. La relation de confiance est brisée et aucun moyen d’accéder désormais à l’imaginaire de vos interlocuteurs. Vous aurez perdu la partie.

A l’heure de prendre la parole, vous vous engouffrez dans un tunnel. La fin de ce tunnel est le moment où la prise de parole est terminée et que la tension redescend. Voyez, il existe plusieurs techniques de visualisation que vous pouvez utiliser afin de parvenir à vous calmer. Votre corps est un moteur qui métabolise ce que vous lui soumettez, et en premier lieu vos pensées, qui sont somatisées et entretenues par des réactions chimiques. Si vous lui soumettez du stress, votre corps réagira en conséquence et se préparera pour une expérience déplaisante. Cependant, si vous invoquez ce même stress sous un nom différent, votre corps ne le reconnaîtra pas comme tel ; ou bien, si vous parvenez à faire disparaître ce stress au travers d’une visualisation, votre corps saura prendre plaisir à l’acte de prendre la parole car ce sera votre choix.

L’empathie est, comme nous l’avons vu, une certaine injonction à l’amour : l’on ne peut rejeter ce que l’on comprend. Tournée vers soi, l’empathie devient de l’amour propre, car avant de prétendre pouvoir distinguer le flux des pensées de ceux qui nous écoutent, nous devons nous rapprocher des nôtres, ces pensées qui sont l’œuvre de nos émotions. Or, nos émotions nous sont peut-être inaccessibles, d’après notre profil psychologique. L’empathie déjoue immédiatement tout sentiment de responsabilité de résultat, à l’heure où nous nous laissons guider par nos sensations pour tenter de réverbérer la voix de la vérité de notre unicité qui résonne quelque part sous la surface immédiate de notre peau. Souvenez-vous, que le corps a une mémoire. Ayez à l’esprit, que vous devez être plus rapide et original quand il est question d’esquiver les tenailles de votre conditionnement. L’acteur Bradley Cooper se répète tous les jours l’axiome suivant : « Seek the Truth daily. » Votre vérité est la vôtre, elle est aussi alignée, paradoxalement, sur des principes universels.

Inutile de vous le cacher, vous traversez ce que vous ressentez et il vous incombe de composer avec. Ce n’est qu’à ce moment-là que vous parviendrez à manifester l’intelligence émotionnelle nécessaire à la prise de parole convaincante.

Convaincante pourquoi ? Car dans le miroir des représentations, un être qui nous comprend et qui, malgré cela, soit à un stade d’évolution futur au nôtre, cet être-là est une aubaine et un catalyseur de notre expérience vers l’évolution que nous espérons. Il en va ainsi pour le monologue intérieur. Un peu comme l’exercice auquel je me plie en écrivant cet article, tentant de me mettre à votre place pour répondre à vos attentes. C’est la même chose pour le monologue intérieur.

Si nous sommes dissociés ou aliénés en temps normal, pourquoi ne pas utiliser cette occurrence à notre service lorsque nous prenons la parole ? En effet, fortifier votre mental vous empêchera de voguer vers la déraison. Vous réussissez à ressentir en même temps que vous pensez, tout en ayant l’intuition des énergies environnantes. Nous appelons cela au théâtre laisser parler la Nature, c’est-à-dire, le subconscient, lui qui est bien plus intelligent que n’importe laquelle de nos élucubrations.

Votre prise de parole structurée est parsemée d’instruments de persuasion, d’images accolées à une narrative argumentative prenante. Rendez-vous compte du poids de chaque élément et accordez-le-lui, ce n’est qu’alors que votre richesse imaginative et émotive pourra éclore, donnant à votre parole un rythme plus aéré et agréable, et une connotation plus vraisemblable et impactante.

L’empathie nous affirme dans notre position de leader

Il existe un lien direct entre empathie et leadership, logique qui plus est. Comment pourrais-je vouloir suivre quelqu’un qui ne me comprend pas ? Nous ne possédons pas tous la même force, celle qui façonne la conviction de notre propre destin. Nous ne sommes pas tous prêts à aller dans la direction établie par notre intuition, par l’appel souverain d’une vision intime. La plupart d’entre nous avons besoin de se sentir compris. Si je suis compris, alors je me place entre les mains d’un guide qui a à cœur mon meilleur intérêt. Evidemment : si ce guide comprend ce que je porte en moi, s’il prend, en plus, la parole et que cette place lui a été accordée, comment pourrait-il ne pas avoir recherché le bien-être qui me manque ? Soyez certains que l’on peut vous comprendre sans avoir votre meilleur intérêt à cœur, mais ne nous attardons pas sur les faux prêcheurs.

L’empathie permet de réguler la nature de notre prise de parole

Par l’empathie, ma parole est délimitée par la réalité émotive de l’autre. Ressentant ce qu’il ressent, de la manière qu’il le ressent, impossible dès lors de brusquer un discours qui s’avérera déplacé la grande majorité du temps.

Non, l’empathie n’est pas seulement comprendre, elle est vivre à travers le cœur d’un autre, retranscrire, dans sa propre chair, le paramétrage exhaustif de sa situation complexive.

Il y aurait beaucoup d’exemples politisés, comme les migrants qui embarquent des navires de fortune, ou les femmes qui subissent le patriarcat dégoulinant de machisme.

Il est tellement facile de rejeter ce que nous ne nous donnons pas la peine d’intérioriser. Il n’est pas surprenant, dès lors, que les leaders soient ailleurs.

Comme nous l’avons évoqué, il ne sert à rien de se méfier de ce qui pourrait nous parvenir de l’autre. De deux choses l’une : vous en apprendrez plus sur vous-mêmes, selon les cordes sensibles touchées par le contact avec l’autre, ou vous catégoriserez et vous rejetterez, le cas échéant, ce que vous avez déjà pondéré comme étant irrecevable (or, il aura aussi fallu y arriver à cette conclusion).

L’empathie est un outil fantastique qui happera votre dialectique intellectuelle indolore pour vous transformer en un véhicule prolifique d’humanité. L’empathie vous permettra de prendre votre auditoire entre vos bras pour le bercer, le toucher et lui apporter un souffle 
d’espoir.

 

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